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mardi 28 mai 2013

L'Impôt sur les Sociétés

Dans les journaux, les forums et les médias en général, vous pouvez lire que la France serait la championne de l’impôt sur les sociétés en Europe. Encore une fois, il s’agit d’une mauvaise interprétation et d’un préjugé pouvant entraîner des conséquences désastreuses.




Ce qui est faux et qu’on peut lire un peu partout

L’impôt sur les sociétés (IS) en France serait le plus élevé d’Europe et culminerait à 36,1%.
La France serait incapable de s’adapter à la concurrence fiscale et son triste record découragerait toutes les entreprises.



La vérité à rétablir


Le taux des PME

Les PME paient en général le taux réduit d'impôt sur les sociétés (15%). Pour ceux que cela intéresse, voici les conditions d’éligibilité (tirées du site des services publics) :
Le taux de 15 % s'applique sur la tranche inférieure à 38 120 € de bénéfices pour les entreprises dont:
  • Le CAHT [note : Chiffre d'Affaires Hors Taxes] est inférieur à 7,63 millions d'€,
  • Le capital a été entièrement reversé et est détenu à au moins 75 % par des personnes physiques (ou par une société appliquant ce critère).
Au-delà de 38 120 € de bénéfice imposable, les bénéfices sont soumis au taux normal [Note : c'est à dire 33,33%].


D’où sort le 36,1% ?

Le fameux taux de 36,1%, c’est la plus haute tranche possible mais inaccessible en pratique ; on parle de taux légal maximum d’imposition. A l'origine il est uniquement destiné aux grosses entreprises : 33,3% pour le taux général majoré de toutes les cotisations et contributions spécifiques aux grosses entreprises. 
En voici les détails (toujours tirés du site des services publics) :
Le taux normal de l'IS est de 33,33 %.
Il s'applique aux sociétés qui réalisent plus de 7,63 millions d'€ de chiffre d'affaires annuel hors taxe.
Il peut être augmenté de majorations : la contribution sociale, la contribution exceptionnelle et la contribution additionnelle. 

Contribution sociale
Elle est de l'ordre de 3,3 % pour les entreprises ayant un CA [Note : Chiffre d'Affaires] d'au moins 7,63 millions d'€ et dont l'IS [Note : Impôt sur les Sociétés] dépasse 763 000 €.

Contribution exceptionnelle
Elle est fixée à 5 % pour les entreprises dont le CA est supérieur à 250 millions d'€ au cours des exercices clos entre le 31 décembre 2011 et le 31 décembre 2015.

 Que signifie ce charabia ?
Voici une clé de lecture pour l’imposition des grosses entreprises réalisant plus de 250 millions d’euro de chiffre d’affaires :
  • De manière générale, l’entreprise paiera 33,33% (taux normal) x 1,05 (les 5% de la contribution exceptionnelle) = 35%
  • Toutefois, pour la part de l'impôt sur les sociétés supérieur à 763 000€, le taux sera de 33,33% (taux normal) x (1,05 + 1,033) (contribution exceptionnelle + contribution sociale) soit 33,33% x 1,083 = 36,1%.
On y est !



Quasiment aucune entreprise concernée par ce taux

"On plomberait alors les grosses entreprises", c’est sans doute cela que vous vous dîtes en ce moment : il n’en est rien car elles ne paient jamais ce taux.

Les entreprises du CAC40 ont en réalité un taux d'imposition inférieur au taux réduit, donc en dessous des 15%. 

En effet, il existe de nombreux moyens (légaux) de minorer l’impact de ce taux :
Le premier est de réduire l’assiette, c'est-à-dire le montant imposé : ce sont les déductions à l'instar des provisions, des amortissements et des intérêts d’emprunt qui vont diminuer le résultat imposable. Ce sont des techniques comptables.
Le deuxième est d'user et d'abuser des dérogations : les niches fiscales. Ce sont des techniques d'ordre fiscal.

L’artisan ou l’entrepreneur du coin ne les connaît pas (bien que son comptable peut lui donner quelques conseils) mais une grosse entreprise avec une cellule juridique et fiscale possède toutes les armes nécessaires pour croquer l'impôt sur les sociétés.

Ainsi, selon le Conseil des Prélèvements Obligatoires de 2010, les entreprises du CAC auraient un taux d’imposition moyen de 8% et non pas 33,33% (ou supérieur). Nous sommes au même niveau que les grandes entreprises américaines et on ne peut pas dire que les États-Unis soit un pays anti-entrepreneurs !
Qui l’aurait cru ?
Paradoxalement, ce  sont les PME qui seraient les plus imposées : 22% en moyenne.

Taux d'imposition moyen rapporté au nombre de salariés. Le taux moyen d'imposition pour les sociétés est donc de 18%. Il est toutefois intéressant de noter l'écart entre le taux moyen des PME et celui des grandes entreprises. Sachant que notre tissu privé est composé à 99% de PME, qu'est-ce cela vous inspire? C'est peut-être du coté de cette injustice et de cette inefficacité au sens économique qu'il faudrait regarder non?



Enfin, il existe aussi des moyens moins légaux de diminuer l’impôt sur les sociétés ou d’en décaler son paiement grâce à l’optimisation fiscale. L’objectif est généralement de localiser les profits dans des pays plus « attractifs » fiscalement : la technique la plus courante est probablement la manipulation des prix de transfert (en particulier sur l’utilisation des brevets et/ou de la marque).
Il existe bien d’autres moyens comme les capitalisations fines, les contrats de façonnage, le CIR,…mais j’y reviendrais dans un prochain article afin de ne pas alourdir celui-là.



Le poids de l’Impôt sur les Sociétés en France

Le cumul de tous les impôts sur les sociétés en France représenterait 2,5% du PIB. 
La France est loin d’être la première de sa catégorie en la matière et ne serait plus qu’en douzième position en Europe ; avec devant elle ma Belgique, la Suède, le Luxembourg, le Portugal et même la Grèce ! Autrement dit, onze nations européennes prélèvent plus d'impôt sur les société  par rapport à la richesse économique du pays même, que la France.



Bref, cette phrase ressort souvent sur ce blog mais il est vraiment facile de faire croire ce que l’on veut en martelant l'information avec des chiffres dénués de tout sens. Dire que la France est championne de l'Impôt sur les Sociétés c'est tromper les gens et décourager les entrepreneurs...alors que cela ne devrait pas être le cas !
D'ailleurs, on occulterait presque que l’impôt permet de financer des services publics essentiels à l’attractivité de notre pays.
Enfin, pour clore ce débat sur l’attractivité de la France, que certains qualifieraient volontiers de nulle, je rappelle ici que, en Europe, notre pays est le deuxième pays le plus attractif en termes d’Investissements Directs de l’étranger (le premier étant le Royaume-Uni).
Comme quoi, la France a bien des qualités à vendre…

Cela ne veut pas dire qu'on peut augmenter les impôts n'importe comment, mais plutôt qu'il vaudrait mieux arrêter de focaliser toute l'attention sur la fiscalité des entreprises. Il y a d'autres pistes beaucoup plus pertinentes.Cela ne veut pas dire qu'il faut augmenter encore les impôts, mais plutôt qu'il faut arrêter de focaliser toute l'attention sur la fiscalité des entreprises. Il y a d'autres pistes beaucoup plus pertinentes.

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