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dimanche 22 septembre 2013

Rapport - Pour une Economie Positive

Jacques Attali a récemment remis le rapport « pour une économie positive » au président de la république. 
Un an de travail et à la clé : 1 nouvelle forme d’Économie, 2 indices, 4 évolutions structurelles, 5 défis et 49 propositions

 


Définition de l’économie positive

L’économie positive se définit comme un capitalisme patient et altruiste pour la croissance et les technologies avec le moins d’externalités négatives afin de viser le long terme.

Derrière cette définition personnelle (simpliste je le reconnais), on sent que l’avenir économique ne doit se faire que par du toujours plus avec, à l’appui, des technologies musclées permettant d’essouffler moins vite la planète et de booster la croissance (gains de productivité, réduction de coût, besoin de moins de travail humain). Deux phrases illustrent cela dans le rapport :
« Pour la première fois [Note perso : en 2030], la majorité du monde ne sera pas pauvre. Leur mode de vie se calquera sur le modèle occidental. ».
« Aussi le management doit-il être repensé pour être à la hauteur des défis induits par la mondialisation et le primat de la technologie. »
Avec un peu plus de 8 milliards d’habitants vivant avec le confort matériel à l’occidental (c’est un peu illusoire il faut l’admettre), les membres du rapport espèrent probablement que les technologies (Primat de la technologie !) compenseront le manque de ressources et la destruction de l’environnement. L’optimisme ne fait pas de mal mais cela relève de l’utopie et de l’idéologie.



Deux indices

     L’indice de Positivité

    C’est un agrégé de 29 indicateurs. Il a été choisi de ne présenter qu’un seul chiffre plutôt qu’un tableau de bord. Je trouve cela dommageable car si une moyenne donne une vision globale, elle ne montre pas là où se trouvent les déficiences. Cette indice englobera plus de données que le simple PIB mais il n’en reste pas une moyenne de moyennes. 

     L’Indicateur de Volonté [pour aller vers l’économie positive]

     « Ease of doing positive economy ». Il montre la détermination des gouvernements à créer un environnement favorable et compétitif (encore la compétitivité). Il semble qu’il se base sur trois indices existants d’inspiration (trop) libérale. Le tableau synthèse reconnaît même des « supposés idéologiques forts » et un manque de prise en compte de l’aspect social.



Quatre Evolutions structurelles

  • Une démographie explosive et mal répartie.
  • Des technologies « vertes », efficaces (comprendre plus efficaces que celles de maintenant), moins chères et interconnectées. Le terme de technologies « vertes » me gênent un peu mais ce qui me choque, c’est l’aveuglement vis-à-vis du facteur risque. Certes les nouvelles technologies tendent vers l’efficacité et des accidents moins fréquents ; toutefois, la gravité des risques est démultipliée à chaque nouvelle innovation (le secteur des énergies en est un bon exemple).
  • Une économie de marché démocratique avec des classes moyennes urbaines, éduquées et droguées à la consommation (La phrase exacte du rapport est : « naissance d’élites« hypernomades »,  qui  représenteront  plus  de  200 millions  de personnes, de passage dans différentes zones urbaines (« villes-hôtels »),  dépendantes  de  réseaux,  consommatrices  de  contenus  éducatifs  et  de  médias  mobiles  toujours  plus  nombreux. »).
  • Un monde apolaire ou multipolaire avec un nouveau centre de gravité : l’Asie, et un continent-clé : l’Afrique.



Cinq défis d’ici 2030

  • De la rareté : des besoins alimentaires (+35%) sans compensation équivalente de la production, le  changement climatique (accroissement des températures d’un demi-degré et du niveau de la mer de 12 cm),
  • Des nouvelles technologies qui « s’imposeront » et « tireront la croissance »,
  • Des inégalités : pauvreté, précarité, vieillissement, urbanisation galopante et chômage des jeunes (50% des 15-30 ans chez les émergents et problématique chez les autres).
  • Des difficultés politiques : sécurité, en particulier les cyberguerres, crise de la gouvernance et généralisation de la démocratie,
  • Une crise idéologique avec un besoin d’assurance pouvant transiter par le totalitarisme ou le fondamentalisme.



Quarante-neuf propositions

Je ne les présenterais pas toutes mais plutôt quelques axes :
  • Rééquilibrer les relations dans l’entreprise, qui pencheraient trop en faveur des actionnaires et des dirigeants. Quelques moyens sont évoqués comme la réforme du management, l’interdiction des stock-options, l’indexation de la rémunération des dirigeants sur l’indice de positivité ou encore la création d’un malus/super-malus sur l’impôt des sociétés,
  • Réformer les normes comptables de façon démocratique, en vue d’y intégrer des données sociales et environnementales,
  • Développer les financements participatifs, le microcrédit et la solidarité nationale, si possible en faveur des innovations « vertes », en allégeant la réglementation. J. Attali  présidant cette commission mais étant également président de Planetfinance (institution de microcrédit où courent de nombreuses histoires peu responsables, socialement parlant), cela ne m’étonne pas qu’il vante les bienfaits de sa paroisse. A l’heure de la crise financière et économique, il demande moins de règlementations, de normes, de garanties,…mais par contre plus de souplesse et même un service civique obligatoire pour la microfinance ! Cette phrase m’a même fait rire !!
  • Passer la vitesse supérieure dans la lutte contre les facteurs déstabilisants du marché : par exemple en isolant les paradis fiscaux et en mettant en place une taxe sur les transactions financières (contre le trading à hautes fréquences),
  • Améliorer le fonctionnement de l’administration grâce aux technologies (cloud computing et échanges d’informations),
  • Appliquer toutes ces mesures non pas à la seule échelle française, mais au niveau européen.




En bref, le rapport pour une Économie positive est plutôt complet et intéressant mais contient peu d'innovations en la matière. On sent l'approche de J. Attali dans ce dossier comme la réponse aux crises par le tout technologique. Je n'ai rien contre les technologies (au contraire j'en suis fan) mais j'ai beaucoup de mal à croire que la technologie guérira les maux de ce monde alors qu'elle en est en partie responsable. Je crois qu'il s'agit là d'une fuite en avant.
Les nouveaux indicateurs apporteraient de nouveaux éclairages, bien que l'idée de moyenne (de moyennes) me gêne : on obtient une vision globale mais finalement peu utile car ne montrant pas les défaillances. Peut-être que la batterie d'indicateurs sous forme de tableau de bord, avec une note globale, aurait été plus judicieuse.
Enfin, le rapport présente des propositions concrètes mais reposent beaucoup sur le bon vouloir des personnes qui ont du pouvoir. Compte tenu du fait que ces  mêmes personnes (ayant le bras long) ont jusqu'à présent tiré la couverture vers eux et que les rapports inégaux dans la société ne datent pas d'hier, je pense qu'il est illusoire d’espérer des initiatives de leurs parts. 

La liberté du choix et les technologies sont de belles choses mais si elles réglaient tout, nous n'aurions sans doute jamais eu besoin d'un tel rapport. Ce travail est de bonne facture mais on a l'impression qu'il ne fait que répondre à "comment créer beaucoup de croissance rapidement" et "comment la faire durer le plus longtemps possible" sans jamais reconnaître que la Terre a des limites. Autrement dit, ce document est organisé autour de la création de richesse, de tout ce qui a un prix. C'est un comble car le mot "bien-être" y est inscrit 37 fois ! C'est un sentiment malheureux car cela signifierait que le bien-être ne se résume qu'à la croissance de la production et de la consommation. Mais faudrait-il s'étonner d'une telle conclusion quand on sait qui présidait la commission?

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