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lundi 18 mai 2009

L'Europe économique et ses défis


Depuis 2008, l’union européenne se trouve face à une multitude de crises :
- Crise institutionnelle (problème du traité),
- Crise économique (récession),
- Crise bancaire (subprimes, crise de confiance),
- Crise diplomatique (conflit géorgien)
- Crise énergétique.
- Crise identitaire.
- Crise démographique : vieillissement de la population et diminution de la part des européens dans la population mondiale (de 7,6% en 2007 à 5,8% en 2050 selon les statistiques d'Eurostat).

Comme toute entité, l'Europe dispose de forces et de faiblesses. Nous allons faire un petit tour européen des difficultés, des enjeux et des solutions proposées et envisagées.

L'Europe économique

1. Ralentissement de la croissance économique

Les chiffres ci-dessus parlent d'eux même.
Face à la crise, la BCE a décidé d’abaisser son taux directeur à 1% et les gouvernements ont, chacun de leur coté, mis en place des plans de relance.

Toutefois le FMI estime que ces mesures ne sont pas suffisantes et qu'il faudra en prendre de nouvelles très rapidement, en particulier concernant la situation délicate des pays d'Europe de l'est. Les difficultés économiques mondiales ont fait fondre les capitaux et le crédit des économies émergentes d'Europe de l'est, obligeant certains (Hongrie, Lettonie, Roumanie, Ukraine et Serbie) à demander l'aide du FMI.

«Il est urgent de mettre en place de nouveaux schémas d'assistance mutuelle au sein de l'UE, ou de renforcer ceux qui existent déjà, afin de faciliter une réponse rapide et commune aux difficultés de paiement qui se font jour dans tous les pays de l'UE, et, idéalement, dans chaque pays voisin de l'Union européenne».
C'est ce que préconise le FMI en précisant que l'effondrement d'un pays pourrait en entraîner d'autres dans sa chute.

Face à une crise mondiale grandissante, l’Union n'arrive (ne souhaite pas ?) pas à coordonner ses plans de relance et cède à la tentation du chacun pour soi.
Certains pays de l’est développent directement des solidarités avec les USA par crainte de la Russie, sans passer par l’UE.


2. L’Europe - Un futur nain ?

Faute de croissance suffisante, l’Europe va voir son poids dans l’économie mondiale diminuer fortement d’ici à 2050. Les États-Unis préserveront leur position tandis que la Chine et l’Inde monteront rapidement en puissance.

L’Europe doit actuellement faire face à 2 grandes puissances : l’Alena (Canada, USA, Mexique) et la Chine. Ainsi, on retrouve bien cette opposition dans le domaine agricole où se pratique la surenchère de subvention.
L’UE est un contrepoids : une Europe unifiée pourrait faire pression politiquement et économiquement pour casser la situation de monopole et faire jouer pleinement la concurrence. Faut-il rappeler qu'aujourd'hui l'économie est l'une des meilleures armes de pression?

Ainsi le rôle de l’Europe aujourd’hui est plutôt comparable à celui d'un médiateur et d'un modèle juridique.
Cette volonté d’être la puissance normative au niveau territorial et à vocation mondiale se fait particulièrement ressentir depuis les années 2000 : en matière financière (lutte contre les paradis fiscaux), en matière environnementale (Règlement REACH, 3x20…), en matière économique (contre les positions de monopole…), etc…

Ainsi, des États, dont la plupart ont du mal à s'imposer dans le marché mondial, peuvent s’associer pour devenir plus fort. L'Union Européenne fait la force de tous les pays qui la compose. Dans cet idéal, avec un traité de Constitution (ou de fonctionnement) et une délimitation maximale, l'Union Européenne devient un bloc uni, où l'État-Nation se trouve certes affaibli mais créant de nombreux avantages économiques et sociaux.

"Le choix est pourtant simple, c’est celui de la puissance ou celui de l’isolement et de la vassalisation."
(HS Alternatives Internationales 2009)

Jean-Claude Juncker, 1e ministre du Luxembourg disait entre autre que :
« Nous pensons encore que nous dominons la planète. Or, déjà aujourd’hui, elle ne nous appartient plus ».

Nicolas Sarkozy a entre dit le 16 octobre 2008 lors du conseil européen que :
«Je crois que cette crise donne l’opportunité de réconcilier les Européens avec l’Europe».

A titre d'exemple et d'information, on peut citer l’hégémonie américaine dans le top 100 des entreprises mondiales appuyée par une innovation (R&D) et une compétitivité sans égales ou encore la puissance du dollar en tant que monnaie mondiale, suivi de loin par l’euro (la deuxième monnaie mondiale).
Enfin, il faut savoir que la majorité du commerce extérieur se fait d’abord dans l’Europe (plus de 60%) et c’est une force majeure. Or la part de l’Europe dans les exportations mondiales est en pleine chute : de 40% dans les années 2000, il tendra vers 30% en 2030 selon le rapport Euromonde 2015 et diminuera de plus en plus à l'avenir.

Aujourd’hui nous manquons de deux dispositifs d’ajustement que sont l’existence d’un budget commun suffisant et de la mobilité de la main d’œuvre ; deux outils qui peuvent appuyer un pouvoir politique centralisé, lui aussi absent en Europe.


3. Le cas du budget européen
On peut le voir à travers le budget européen.
En effet, si les États ont acceptés de renoncer à leur pouvoir monétaire (la planche à billet) au profit d’une économie commune, ils ont conservé leur souveraineté en matière budgétaire et fiscal. Le budget européen à 1,1% du PIB demeure trop faible pour jouer le moindre rôle de stabilisation économique.



Le pouvoir budgétaire reste donc ancré dans chaque nation et les seules négociations sur le cadre budgétaire ont montré que les Etats étaient uniquement concernés par leur solde net.
Conséquence : Dans ces conditions, on ne peut espérer qu’une harmonisation économique est sociale par le haut… On en oublierait presque le projet politique de départ : favoriser le rapprochement des niveaux et des modes de vie.
Comme dit précédemment, un État victime d’un choc ou d’une crise ne peut compter que sur lui.

Les États se sont juste mis d'accord sur un pacte de stabilité et de croissance dont les objectifs sont d’une part, d’éviter toute dérive risquant de déstabiliser l’euro et ces adhérents, d’autre part, de garantir des marges de manœuvre suffisantes en cas de ralentissement. Ce pacte fixe quelques règles en matière de dette (60% du PIB) et de déficits (3%). Mais en pratique ce pacte est peu efficace car ne sanctionne que trop peu son non-respect. D'ailleurs ce pacte est très controversé car finalement, il demande l'application de règles quel que soit la situation la culture et le contexte du pays ; en se concentrant sur les déficits, le pacte n’a pu être conscient de déséquilibres pourtant important…
Enfin, pénaliser des pays déjà en difficulté est, à mon goût, contreproductif.

Malgré toutes les affirmations politiques de travailler ensemble, les actes en sont tout autre. On peut citer le cas du Royaume-Uni (et d'autres) qui refusent la monnaie européenne, les fraudes de la Grèce pour son entrée dans l'UE, ou encore, pendant ces temps de crise, des politiques suivies strictement nationales. De nombreuses institutions perçoivent cette faible solidarité entre les pays de la zone euro comme un risque majeur (cf. les spreads actuels)
C’est l’effet « sauve qui peut ».

Pourquoi ce manque de coordination et de solidarité ? Plusieurs raisons ont provoqué cet immobilisme :
- Le sentiment européen que ce n’est pas notre crise,
- L’envie de profiter de la relance des autres (états-membres et pays du G20),
- La focalisation sur le solde net national du budget en commun,
- La rancœur profonde de l’ouest et de l’est, les uns se montrant pingres envers les autres, et les autres usant ouvertement du dumping fiscal et social. Et je dirais à ce propos, que les petits pays ont désormais l’avantage sur les grands (compensation aisée de la demande intérieure par la demande extérieure). Ce n’est pas pour rien si dans les grands gagnants de l’UE on retrouve le Luxembourg ou l’Irlande !

Cela dit, il faut savoir que de manière globale tout le monde y perd ; on le voit très bien à travers le ralentissement de la croissance économique de l’UE.


4. Que faire pour l’économie européenne?
C’est effectivement un chantier important entre des pays où se resserrent le crédit (PECO), d’autres ayant des problèmes similaires à l’économie américaine, en plus de ceux qui voient leurs exportations s’effondrer.

Sortir de l’UE ? Cela ne semble pas envisageable. Évidemment cela aurait un effet positif sur la compétitivité mais lors du décrochage du taux de change, notre dette exploserait car elle resterait libellée en euros.

Théoriquement, l’hypothèse qu’un État de l’UE se déclare en faillite est possible. Elle l'est même de plus en plus possible, compte tenu de la situation dans certains pays comme la Slovaquie ou la Roumanie, noté respectivement D et C par Euler Hermès, le leader mondial de l'assurance crédit.
Dans un tel cas, les autres États seraient alors bien contraints d’intervenir, car les États européens n'ont plus le contrôle de la planche à billets. D'un autre coté, quoiqu'en dise, nous ne pourrons laisser un pays européen tomber en faillite. Mais on peut se demander s'il faut en arriver là pour que se développe des vrais mécanismes de solidarités.
Il reste bien une solution alternative : laisser le FMI intervenir, mais ce serait paradoxal dans une Europe qu'on veut unifiée et unifiante.

Il faut donc trouver des solutions et sortir de l’immobilisme européen.

Une solution nous vient du fameux rapport d'experts (dirigés par Jacques de Larosière, ex-patron du FMI) en février 2009, avec pour objectif d'influencer la commission.
De nombreux points critiques ont été mis à jour comme le manque de coordination (et de mécanismes) ou encore le manque de supervision et de règlementation.
Ainsi la principale piste proposée a été de se doter d'outils permettant de lutter contre ces dysfonctionnements et limiter le court-termisme, consolider les systèmes de règlementations et de supervisions au niveau national et, dans une moindre mesure, au niveau international.
Par quel moyen? En donnant plus de pouvoir à la BCE pour superviser l'UE, en lui créant par exemple une institution : un Conseil Européen du Risque Systémique (ESRC) qui aura pour objectif d'analyser la stabilité financière et prévenir les risques de système.
Deuxième moyen, la création d'une institution indépendante,
un Système Européen de Superviseurs Financiers (ESFS) pour coordonner les politiques économiques nationales.

Ce rapport a été critiqué car ne cherchant et ne traitant pas les causes des dérèglements de la finance de marché (sort des innovations financières? Séparation des activités des banques? Notion d'aléa moral et absence de sanctions contre les banques?) ou quant à l'enclavement supposé de l'Europe.


Une autre solution est proposée par % ATTAC ; Selon cette organisation, il faudrait mettre en place une réforme radicale :
- Augmenter le budget européen (il est estimé que 5% du PIB serait satisfaisant),
- Remettre en cause l’absolue indépendance de la BCE (qui semble être un obstacle à la coordination économie),
- Assouplir le pacte de stabilité et le rendre plus cohérent,
- Remplacer le Conseil de l’Europe par un CPES (Conseil des Politiques Économiques et Sociales) qui travaillerait avec le parlement européen pour coordonner l’économie européenne.

A bon entendeur.
La construction d’un gouvernement économique serait un premier pas mais est vraiment très complexe…On parle d’usine à gaz : qui déciderait ?
Les ministres de l’économique de chaque État ? Les chefs de l’État ? Les parlementaires nationaux ? Les institutions européennes ? Comme chacun voudrait tirer son épingle du jeu, on comprend très bien qu’il faudrait construire un processus politique très complexe qui devrait associer l’exécutif de chaque pays, le parlement européen et la commission européenne. Difficile d’imaginer un tel gouvernement à l’heure actuelle…

Pour ceux qui ne croient plus (pas?) en l'Europe et en son avenir, un sondage de mars, publiée dans Libération, nous apprends que face à la crise économique, 59% des français voudraient soit qu’on renforce la coordination des politiques soit, qu’on mette en œuvre des politiques européennes communes.

Selon le rapport de la CIA et d'experts régionaux, l'avenir de l'Europe en tant que superpuissance dépend grandement de réformes structurelles qu'elle engagera sur le plan économique et social pour traiter, entre autres, les problèmes:
- Dues au vieillissement de la population,
- A la légalisation et à l'intégration des immigrés,
- A la flexibilité du travail (encourager les femmes et les seniors principalement).
Les experts considèrent que la politique du chacun pour soi cumulé à un manque de vitalité économique pourrait entraîner une fragmentation ou pire, à une désintégration de l'Europe. Ces analystes jugent que le taux de croissance européen est tiré à la baisse par l'Allemagne et son droit du travail trop restrictif.

Toutefois, le FMI continue d'encourager une coordination européenne:
"L'activité va redémarrer en Europe au second semestre 2010 à la condition que les pouvoirs publics prennent "de nouvelles mesures".

Finalement, la question centrale de toutes ces crises est:
Qu'est-ce que l'Europe?
Une utopie ? Un simple marché économique ? Une culture occidentale-chrétienne ? Un projet de paix ?

Le débat est ouvert avec, entre autres, les nouveaux défis comme le marché transatlantique EU-US ou encore les propositions de Nicolas Sarkozy à Nîmes, le 5 mai 2009, qui proposaient, parmi d'autres, un régulateur bancaire.

Aujourd'hui on peut dire qu'il manque encore l’explicitation et la promotion d’intérêts européens communs mais rappelons que l’UE est le premier marché du monde, ainsi que l’expérience la plus achevée d’intégration politique régionale sur une base démocratique.


Edit:
  • Le 18 juin 2009, lors du sommet européen, il a été décidé de mettre en place une réforme incluant un comité européen du risque systémique et trois nouvelles autorités pour mieux surveiller les banques, les assurances et les marchés financiers (les fameux ESRC et ESFS proposés ci-dessus).

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